Tu ne vois pas qu’il n’y a plus de murs

«Tu ne vois pas qu’il n’y a plus de murs?» est le titre d’un collage sur support de 8 x 3m, visible tout le mois de janvier 2021 aux Ursules (Saint-Etienne) sur le Mur de Saint-Etienne (un collage par mois pour la santé publique). Il s’agit d’un hommage au poète palestinien Mahmoud Darwich : « -qu’est-ce que tu leur veux ? -qu’ils peignent cette guerre sur les murs de la ville. – qu’est-ce qu’il t’arrive ? Tu ne vois pas qu’il n’y a plus de murs? » – extrait de Une mémoire pour l’oubli.

Ce travail IN SITU a pris place sur ce qui est appelé «Le Mur de Saint-Etienne», un espace géré par les street-artists Ella & Pitr.

Lorsque nous avons répondu à cette invitation, nous avons souhaité questionner l’invitation poétique du mur, questionner le sens du mot. 

Il y a donc ce mot « mur » et je m’en suis saisie comme une matière poétique. 

Nous nous sommes donc questionnés sur ce qui faisait mur. Selon les endroits du monde, il ne résonne pas de la même manière. Il y a ces murs qu’on a détruits, il y a ceux qu’on construit en ce moment entre les peuples et il y a le mur de la Palestine.

C’est ainsi que j’ai souhaité me saisir de l’oeuvre de Mahmoud Darwich, poète et militant palestinien, qui se définissait comme «un simple soldat dans la bataille de la liberté et du chant» (L’exil recommencé).

Je me suis appuyée sur Une mémoire pour l’oubli qui traite du bombardement de Beyrouth en 1982 et j’en ai extrait un dialogue entre XXX et Darwich aux accents aussi surréalistes que la possibilité d’une guerre. 

Dans le même temps, mes recherches ont porté sur le travail réalisé par Rachid Koraichi sur l’oeuvre de Darwich. Ensemble, ils ont publié un recueil des poèmes de Darwich que Koraichi, dont le travail porte sur la calligraphie, a gravé. Son travail de calligraphie a été source d’inspiration.

Dans la perspective de faire dialoguer la langue originale du texte avec sa traduction en français, il m’a fallu décrypter le système de cette langue, comme en témoignent mes recherches.

Choisir la typographie a donné lieu à de nombreuses interrogations et recherches. Il fallait trouver des polices d’écriture qui puissent se faire écho en français comme en arabe et s’assurer que la calligraphie arabe se lise correctement. J’ai donc choisi, pour l’arabe, une police nastaliq.

Pour ce qui est du français, j’ai choisi une onciale dont les courbes et l’irrégularité (le rythme) rappellent l’art de la calligraphie. 

En termes de composition, cette fresque s’appuie sur une sorte de circuit de lecture qui évoque le boustrophédon. De droite à gauche, l’arabe se déploie et se joint au français qui suit une organisation de gauche à droite. Au centre, le mot «mur» en arabe est celui autour duquel tout s’organise. 

Car, tout autour, ces textes qui se soutiennent les uns et les autres, tels des murs précaires.

Fonts :

  • « De bellis Macedonicis » , onciale
  • Iran Nastaliq


Projet réalisé au sein du collectif 171 canons.